La mémoire à condensateurs
(c) Juillet 1997 - Jean-Pierre PONCHELLE
A cette époque, le principal support de saisie des informations était la carte perforée, qui servait aussi de ce que l'on qualifierait aujourd'hui de mémoire de masse, comme nos disques durs.
Je suis obligé de faire un petit rappel de ce qu'était la carte perforée pour bien comprendre le fonctionnement de le mémoire à condensateurs.
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La carte perforée était un isolant électrique en carton léger d'épaisseur constante de 0,017 millimètres d'épaisseur, sa longueur en était de 182,3 mm et sa largeur 82,3 mm.
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Elle avait 12 lignes horizontales de 80 colonnes verticales, chaque colonne pouvait recevoir une lettre ou un chiffre sous sa forme codée. Un chiffre étant composé d'une perforation de forme rectangulaire, placée dans une des 80 colonnes. Les lettres avaient 2 perforations et les caractères spéciaux, 3.
La lecture.
Entraînée par des galets et en commençant par la ligne des 9, la carte passe entre un balai et un rouleau dont l'alimentation en courant pulsé est faite par un rupteur. Celui-ci est synchronisé avec les positions possibles des perforations qui, si elles existent, donnent naissance à des impulsions de lecture.
Nous avons dit qu'il y avait 80 colonnes, il y avait forcément 80 balais.
La lecture sera exploitée de différentes manières, ou alors stockée en mémoire pour une exploitation ultérieure, d'où l'utilité de la mémoire à condensateurs.
La mémoire à condensateurs: comment ça marche ?
C'est simple.
Un condensateur (polarisé) peut être comparé à l'accumulateur de votre voiture, mais si ce dernier perd sa charge en 90 jours environ, le condensateur lui la perd en quelques secondes.
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Reprenons le schéma ci-dessus.
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En même temps que la carte faisons avancer une plaque isolante comportant autant de plots qu'il y a de lignes dans la carte (c'est à dire 12).
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Soudons un condensateur à chaque plot : ça marche ! Notre mémoire à condensateurs fonctionne.
L'Homme: à quoi lui sert la mémoire ?
Réfléchissez...
De toute manière, vous arriverez à la même conclusion :
"Ca ne servirait à rien à l'homme d'avoir de la mémoire si le temps n'existait pas"
Pour l'ordinateur c'est la même chose.
Maintenant, le TEMPS, c'est quoi ?
Le temps, c'est quelque chose qui avance mais si l'on regarde ce qui s'y passe, c'est un éternel recommencement dans lequel on avance pas à pas.
Exemple :
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Les années.
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Les saisons.
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La pendule.
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Les planètes.
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Les générations.
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Les mêmes erreurs commises par les hommes, etc, etc...
Ca porte un nom: ce sont des cycles.
Pour lire nos cartes perforées, nous ferons la même chose :
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Nous allons lire nos cartes perforées les unes après les autres, nous appellerons ça CYCLES.
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Pour chaque ligne lue nous avancerons pas à pas, nous nommerons cela PAS.
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Comme les douze heures de la pendule, il y a douze lignes sur la carte.
Il nous faut donc une horloge pour sonner les heures, nous l'avons: c'est le rupteur du schéma de la page précédente.
Ce que je viens de vous dire est là pour vous familiariser avec les mots, et simplifier la suite.
Comment sont introduites les cartes sous les balais de lecture ?
C'est simple, regardez comment sont introduites les pages dans votre imprimante: par des rouleaux, c'était la même chose dans les unités de lecture.
Justement, problème !!!
Entre chaque page de votre imprimante, il y a un espace, c'est la même chose pour les cartes.
Et nos 12 heures ?
Pour la pendule, on n'arrête pas le cours du temps, donc pour notre horloge non plus.
Nous allons compter combien de pas il y a entre deux cartes, et nous ferons une horloge à 15, 16, 17 pas, voire plus, selon l'espace inter-cartes propre à chaque machine de traitement.
Résultat :
Oh là!... des condensateurs qui défilent: il va y en avoir beaucoup comme ça ?
Effectivement, il faudrait peut-être éviter, sinon on arrive à un plaque isolante de dix kilomètres!
Alors, nous avons vu que tout était un éternel recommencement, en géométrie ce n'est pas le cas pour la droite, mais par contre c'est vrai pour le cercle.
Vous m'avez vu venir: nous allons mettre nos 15 plots de condensateurs sur un cylindre ?
Exactement, toutefois dans la pratique c'est impossible à réaliser car ce serait trop petit pour y loger les condensateurs, mais vous allez voir que çette difficulté va se résoudre.
Faisons un petit inventaire :
Combien nous faut-il de caractères en mémoire ?
- Nous sommes en 1940, il ne faut pa être gourmand: 120 caractères vont suffire.
Si l'on mettait 6 caractères par cylindre?
- Ouf ! C'est bon, ça nous fait des cylindres de 90 plots, c'est réalisable.
La Mémoire: c'est comme l'écolier!
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Elle lit un caractère quand on lui dit.
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Elle garde en mémoire.
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Elle utilise la mémoire longtemps après.
Reprenons en passant à la pratique :
Elle lit un caractère quand on lui dit :
Reprenons le schéma :
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Pendant les 12 pas de la carte, nous allons valider l'entrée en mémoire par un relais.
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Il se présente une perforation Zéro.
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Elle passe par le relais.
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Elle charge un des 90 condensateurs au hasard (ne perdez pas de vue que la "piste" des plots de condensateurs est sur un cylindre).
Elle garde en mémoire :
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Le cycle de lecture est terminé.
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Au cycle suivant, on ne lit pas de carte, ou alors une carte est lue mais on ne veut pas introduire de valeur en mémoire.
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Au pas Zéro, nous allons décharger le condensateur chargé au cycle précédent dans un nouveau relais.
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Une nouvelle impulsion du rupteur va passer par ce relais pour recharger un autre condensateur via le contact repos du premier relais.
Important.
Si le premier condensateur avait déjà perdu une partie de sa charge, vous avez remarqué que le second relais avait été mis là pour envoyer une impulsion toute fraiche au condensateur du cycle suivant.
C'est ce que l'on appelle le "refreshing" dans les mémoires de nos micro ordinateurs, mais bien sûr ça ne se fait pas avec des relais.
Elle utilise la mémoire longtemps après :
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L'utilisation de la mémoire peut se faire indéfiniment, jusqu'à la nouvelle validation d'entrée.
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La sortie de mémoire est prise sur l'impulsion "régénérée" du second relais.
Réalisation pratique.
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Nous avons vu que l'on mettait 90 condensateurs par cylindre.
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En fabrication on découpera ce cylindre en "parts de gateaux" de 10 condensateurs.
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Pour 1800 condensateurs, il faudra 20 cylindres.
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On assemblera ces cylindres pour faire un tambour de 25 cm de diamètre et 50 de long environ.
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Sur le pourtour de chaque cylindre, il y aura 6 supports de balais (pour 6 caractères).
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Chaque support de balais comportera:
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Un balai de lecture pour restituer le condensateur enregistré. La valeur contenue sera retournée à son balai d'enregistrement en amont sur le cylindre.
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Immédiatement à la suite un autre balai pour décharger le condensateur.
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Un balai d'enregistrement, mais pour un condensateur de la position de mémoire en aval.
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A cette époque l'informatique n'en était pas à ses débuts, et pourtant vous voyez que les moyens n'étaient pas les même qu'en 1997. Il en était de même pour la photographie, et voici ci-dessous la seule photo que j'ai pu retrouver.
En complément, voici 2 images de Tambours magnétiques :